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Séminaire : Pour la survie des forêts franciliennes | FNE IdF

ANTICIPER ET AGIR
 
Jeudi 8 juin France Nature Environnement Ile-de-France organisait un séminaire "Pour la survie des forêts franciliennes : Anticiper et Agir !" à l'Académie du Climat de Paris. 
Parmi le tour de table intitulé "Gérer les conflits d'usage forestiers", les Amis du Bois de Verrières sont intervenus au tour de table.
Étaient présents des gestionnaires publics et privés, des propriétaires privés de forêts, des représentants d’associations : 
  • Sophie Durin LES AMIS DU BOIS DE VERRIÈRES et membre du collectif l’APPEL DES FORETS D'ILE-DE-FRANCE 
  •  Dominique Defrance FRANSYLVA Fédération Forestiers Privés de France
  •  François HEUTTE ALLIANCE FORETS BOIS
  •  Danielle Albert ESSONNE NATURE ENVIRONNEMENT
  •  François Gross LPO France 
  •  Dominique Bonte SNUPFEN
 
Retour sur notre intervention. L'animation était assurée par Pierre Gilbert, journaliste.
 
 
 
 
 
PARLEZ-NOUS DES SERVICES NON MARCHANDS DE LA FORET
Sophie Durin : les revenus issus de la vente du bois, de la chasse représenteraient 20 % de la valeur des forêts, d'après le rapport du groupe de travail en 2009 de Bernard Chevassus-au-Louis du centre d'analyse stratégique, puis repris dans le rapport Cattelot sur la forêt en 2020.
Les 80% autres services -non marchands- (c'est à dire la régulation du climat, de l’érosion, de la qualité de l’eau et des activités récréatives et culturelles) sont estimés à plus de 5X la valeur de la production de bois, soit l’équivalent de 1 000 à 2 000€/ha/an.

Si l’on reconnait les bienfaits des forêts sur la santé et l’environnement, alors :
  • Qu’elle est la part du budget de l’O.N.F. consacrée spécifiquement à la santé environnementale des habitants ?
  • Qu’elle est la contribution du ministère de la Santé destinée à la forêt pour la santé environnementale des habitants ?
Si la réponse est aucune, pourquoi ne pas aller rechercher ces contributions, puisque la gestion de la forêt concerne aussi un objectif social et sanitaire ?
 
 

 
II. QUELS SONT POUR VOUS LES CONSTATS ET LES DOMMAGES CAUSES A LA FORET ?
SD : le dernier rapport du GIEC se résume en 3 mots : Gravité, Urgence, Capacité.
Notre puits de carbone est en baisse et la santé des arbres vacille, liés aux activités humaines. Cela se traduit par une augmentation des coupes, une baisse de la croissance des arbres et une augmentation de leur mortalité.
Afin d’adapter nos forêts au changement climatique et se développer durablement, il devrait y avoir une diminution des prélèvements. Or, nous assistons à une INTENSIFICATION.
 
  • 80% des arbres ont moins de 100 ans : c'est  très jeune au regard de leur durée de vie. Arrêtons d’éclaircir nos forêts car les coupes favorisent le réchauffement de la forêt et elles assèchent les sols.
  •  La futaie irrégulière nous a apporté les cloisonnements et les engins qui vont avec. Ces couloirs d'exploitation de 4X24m, sont une trouée dans la forêt, où plus aucun arbre ne repoussera. Ces cloisonnements détruisent 1/7 de la forêt !
  •  Les coupes rases sont des atteintes au sol et au paysage forestier, elles compromettent les chances de repousses.
  •  Le suivi des travaux forestiers est insuffisant et les contrôles faits à postériori, notamment sur l’adaptabilité du chantier, lors de conditions climatiques peu favorables (épisodes pluvieux) ou sur sol peu portant.
  •  La mécanisation des travaux forestiers occasionnent des conséquences sur le sol, en créant des ornières, des compactages, qui sont des dommages irréversibles sur le sol, la biodiversité et le peuplement.


PARLEZ-NOUS DU COLLECTIF DE L'APPEL DES FORETS D'ILE-DE-FRANCE
SD : les Amis du Bois de Verrières sont membres du collectif l’Appel des forêts d’IdF lancé en 2021 qui regroupe 200 associations /unions / fédérations signataires de l’Appel, sur un territoire comprenant 7 départements et plus de 50 massifs forestiers publics et privés.

Les demandes du collectif concernent :
• PLUS DE GRIGNOTAGE/ NI AMPUTATIONS : c'est une perte sèche pour le forêt, la biodiversité mais aussi pour les franciliens;
• PLUS DE COUPES RASES : ce sont des atteintes au sol et au paysage forestier
• L’ARRÊT DES COUPES DE BOIS pour alimenter les chaufferies de biomasse pour des raisons environnementales et sanitaires;
• Une meilleure CONCERTATION participative avec les acteurs de la forêt et notamment dans les aménagements des forêts. Actuellement, la participation des associations n’est qu’informative. De la même manière, la liberté d’accès à l’information environnementale comme le précisent le code forestier et la législation française  et européenne. Rendons ces données accessibles SANS restriction aux Forêts privées et publiques.
• La création d'un STATUT PLUS PROTECTEUR adapté aux forêts franciliennes et à la santé des franciliens.
 
Nous précisons que le collectif dénonce tout acte d’agression et incivilité à l’égard des agents forestiers que nous ne cautionnons sous quelque forme que ce soit.
 

EXPLIQUEZ-NOUS POURQUOI UN STATUT DE FORETS URBAINES ?
SD : les forêts d’Ile-de-France, patrimoine naturel, sont un bien commun préservé au fil de l’histoire, reconnues pour certaines sur le plan européen et mondial, elles sont des réserves de biodiversité et le POUMON VERT autour de Paris.

Le collectif des forêts d'Ile-de-France demande la création d'un statut plus protecteur aux forêts urbaines, au moins aux forêts publiques et étendu aux forêts privées. Car les forêts IDF sont particulières :
  • D’abord elles sont toutes urbaines, part la densité humaine et l'artificialisation des sols ;
  • Elles accueillent 100 millions visiteurs/an ;
  • Enfin, il existe une rupture d’égalité en surface forestière : les franciliens (20% de la population) bénéficient de 14X moins de surface forestière que le reste de la France, soit 225m2/hab contre 3 110m2/hab.

A caractère particulier = STATUT PARTICULIER 
Car de moins en moins de forêts et une urbanisation de plus en plus dense se traduiront  par plus de maladies et plus de mortalités (humaines).
 
Nos forêts ne sont pas uniquement des réserves à bois. D’elles dépend notre existence.


OUI, MAIS IL FAUT COUPER DU BOIS POUR ENTRETENIR LES FORETS
SD : la préservation des forêts n'est pas une mise sous cloche. Au contraire ! Si l’on reconnait leur rôle bénéfique pour le bien-être, la santé et l’environnement, alors mobilisons des ressources sanitaires pour les maintenir, les étendre, les densifier et accroître les ressources en eau.
Nous trouvons bien de la place pour construire des habitations, des infrastructures, trouvons également de la place pour créer des CORRIDORS pour relier entre elles les forêts et la biodiversité. Pour que la forêt prenne soin de nous, prenons soin de la forêt !
 
Augmenter les moyens de l'ONF
Il faut plus plus de moyens à l'ONF pour s’occuper de maintenir et d’améliorer nos forêts sur notre territoire. C'est absurde de ne penser l’adaptation, l’entretien des forêts et le financement pour leur plantation qu’avec la coupe de bois. Le baliveau (plumeau chétif) ne compensera jamais l’arbre adulte. Et avec l’accélération du réchauffement, nous n’avons PAS le temps !
  • Demande-t-on aux bâtiments de France de vendre leur pierre pour financer leur restauration ? C’est pourtant ce à quoi l’ONF est contraint : vendre son capital, son patrimoine, pour couvrir ses frais. Aucune entreprise ne peut durer à ce régime !
 

Replanter dix jeunes arbres au lieu d'un vieux est une triple arnaque. C'est un pan du patrimoine qui disparait avec sa faune et sa flore associées. Un vieil arbre ne coûte rien, alors que les 10 coûtent au contribuable. Écologiquement c’est une aberration, puisque pour compenser la surface cumulée de la taille du vieil arbre, il faudra attendre 25 ans !  Francis Hallé


L compte-rendu d'Hubert Guilbaud de l'association
Nous sommes unanimes pour dire que les temps d'échanges et de dialogues étaient insuffisants : la parole empêchée génère toujours un sentiment de frustration. Les mains levées étaient majoritairement du milieu associatif.
Une nouvelle fois, lorsque l'on aborde le sujet des forêts, d'emblée on parle des fonctions, jamais de sa dimension existentielle comme sujet vivant, une entité naturelle à part entière.  Reconnaitre la forêt pour ce qu'elle EST non point pour ce que l'on veut qu'elle SOIT.
 
La séquence introductive animée par le professeur Abbadie était intéressante. Son point de vue d'écologue est important. Le seul bémol concerne "les jeunes arbres qui capteraient plus de carbone que les vieux". JC Marcus l'a relevé également. Cette affirmation est remise en cause depuis 2014 par le Birmingham Institut of forest research UK et l'Eastern Oregon Legacy Land USA. Ces découvertes bousculent les dogmes de la nécessité de rajeunir les forêts.  On peut se poser la question qu'est-ce qu'un vieil arbre dans nos forêts où 80% de nos peuplements ont moins de 100 ans. C'est aussi méconnaitre le rôle d'un arbre adulte ou âgée en termes de biodiversité.
 
L'intervention de la DRIAFF se résume à prôner une gestion durable en maintenant la biodiversité sans porter préjudice aux écosystèmes. Force est de constater que cette gestion participe à l'effondrement de notre biodiversité (18% est à peu près en bon état).
 
Les représentants de la filière bois sont très pro, bons communicants aux discours bien rodés. Il en ressort une stratégie de dynamiser, structurer et stimuler le marché. Le bois est une matière, une ressource. Ils nous disent aussi qu'une forêt en bonne santé est très productive.
 
La partie concernant la forêt de Chantilly est particulière compte tenu du mode de gouvernance mis en place. L'association des savoirs professionnels et citoyens peut être une piste fédératrice pour rassembler la société civile et les experts.   
 
La suivante table ronde avec Sylvain Ducroux ONF m'a un peu déçu. Il est l'initiateur d'un rapport "Diagnostic initial et état des lieux des forêts péri urbaine d'IDF" paru en 2013 je pense.  Il souhaitait à l'époque que l'ONF accepte plus de participation du public dans l'élaboration des plans de gestion. 10 ans après rien n'a changé. Il ouvrait une perspective intéressante et réformatrice.
 
Les interventions de l'ADEME et d'AIRPARIF n'ont guère été convaincantes. Les sujets donnaient l'impression qu'ils n'étaient pas ou peu maitrisés, notamment concernant les chaufferies industrielles, leur multiplication. Les risques sanitaires et environnementaux dans les alertes du GIEC n'ont pas fait l'objet d'un paragraphe.
 
La dernière table relative aux conflits d'usages, nous laisse entendre que les perturbateurs seraient la surfréquentation, les VTT, les déchets, les chats. Les forestiers seraient incompris donc il faut éduquer le public, communiquer pour expliquer les travaux forestiers. Heureusement que Sophie a rééquilibré les perceptions en ajoutant que des conflits peuvent aussi naitre des pratiques forestières.
 
J'attendais plus de soutien du SNUPFEN pour des équipes ONF en souffrance, pour un service public forestier de qualité. Le projet de privatisation est toujours dans les cartons du gouvernement.
 
Quant à la LPO, les oiseaux en forêt sont heureux. Je me souviens d'Alain Dugrain Dubourg dénoncer les travaux forestiers responsables en partie du déclin de la faune en forêt.
 
Ces rencontres ont le mérite d'exister, elles nous permettent de nous faire entendre et de faire évoluer les décisions qui nous concernent tous.
-Réglementation des coupes rases en forêt privée et des coupes sanitaires en forêt publique.
- Élaborer un véritable statut de forêt de protection
- Augmenter la libre évolution en attribuant des nouvelles missions à l'ONF.
- Revoir la fiscalité forestière pour que la protection soit plus rémunératrice pour les forestiers que les coupes de bois.
- Faire évoluer notre droit environnemental et construire une nouvelle réalité juridique en donnant plus d'opposabilité aux droits de la nature et réduire les droits sur la nature.
L'homme à deux atouts, la conscience de la situation et l'intelligence des solutions.

 

▶️ Pour aller plus loin :

Groupe de travail de Bernard-Chevassus-au-Louis et Romain Pirard : https://hal.science/hal-03449673/document
 

 


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